Pourquoi se lancer dans une telle aventure?
Mais qu’est-ce qui peut bien pousser quelqu’un à mettre sa vie plutôt douillette et prévisible en suspend pour se lancer dans une aventure semblable. Les raisons sont évidemment complexes et multiples. Clarifions tout de suite que j’ai 45 ans, et que je n’ai encore jamais voyagé à l’extérieur des Etats Unis et du Canada. J’ai également une épouse incroyable, trois jolis enfants, une maison, plusieurs vélos, deux autos, un chien, etc… Précisons aussi que ce voyage m’effraie plus que les mots ne peuvent le dire. Et pourtant…
Ma petite histoire
Je suis le dernier d'une famille de huit enfants et je viens d'un petit coin bien tranquille, Les Éboulements, à un peu plus de 1h en auto à l'est de Québec, dans la région de Charlevoix. J’ai appris à faire du vélo plutôt tard dans la vie – vers les 13 ou 14 ans. J’ai fait mes premières distances de plus de 100km, et quelques petits voyages lorsque j’étais à l’Université. Dès la premières fois, la possibilité de parcourir de plus grandes distances à bicyclette m’a fasciné. Voir du pays sans perdre le contact avec le terrain. Constamment se demander quel sera le prochain paysage après la colline suivante. La sensation, l’euphorie indescriptible après une longue journée sur son vélo. Cette fierté lorsque des gens curieux vous approchent pour connaître les détails de votre petite aventure. Je me souviendrai toute ma vie du groupe de retraités arrêtés à une halte routière au haut d’une longue côte dans les Rocheuses, et qui m’applaudissaient en m’encouragent à finir la montée de plusieurs kilomètres sous un soleil de plomb et une chaleur suffocante. Je crois que le vélo, ce mode de transport autonome, fascine un peu tout le monde d'une façon ou d'une autre.
« Don't let fear kill your dream »
Ah oui, la fear.... J'essaie de me préparer le mieux possible. C'est la seule façon que je connaisse de la contrôler. Et puis, tout est relatif. Au début, je m'inquiétais des ours en Alaska et en C.-B. Après avoir lu le blog d'un autre, je devrais apparemment m'inquiéter davantage des bisons que des ours. Ces derniers risquent fort de m'ignorer quand ils me verront. Par contre, le bison mâle pèse entre 800 et 1100kg, ce qui ne l'empêche pas de courir à plus de 70km/h. J'aimerais mieux ne pas en voir un se fâcher.
Ah j'oubliais. Parmi les autres choses qui m'effraient le plus, il y a les meutes de chiens en Amérique Central et du Sud. Apparemment, les chiens là-bas n'ont rien à voir avec nos toutous bien nourris. J'ai lu un peu sur le sujet, et surtout, comment se protéger. Des choses du genre vaut-il mieux traîner un grand nombre de petites pierres, ou un plus petit nombre de plus grosses pierres? Le plus hilarant, c'est de devoir traîner du poids additionnel sur un vélo déjà surchargé que pour se protéger de clébards malfamés qui peuvent cependant avoir la rage. Et pis, il y a également toute la panoplie de maladies possibles, de la tourista au paludisme. Dans ce domaine, je dois avouer que je m'y connais malheureusement très peu. Au minimum, il va falloir connaître un peu les symptômes enfin de savoir quand s'inquiéter.
Maintenant, les raisons...
Voilà, j'y pense depuis un bout de temps, et aujourd'hui, j’ai la nette impression que, pour moi, le fruit est mûr. Au début, je me suis dit que ça n'avait aucun sens. Et puis, peu à peu, je me suis rendu compte que d'autres l'ont fait avant moi. Alors pourquoi pas moi. De toute façon, j'ai sérieusement besoin d'une pose dans ma vie pour décider ce que je veux faire pendant la deuxième moitié de celle-ci. Si je dois franchir le seuil de ma porte, c’est maintenant ou jamais.
Enfin, parmi les nombreuses raisons qui me motive à partir, voici celles qui me paraissent les plus importantes, sans ordre précis:
- Apprendre une nouvelle langue et mieux découvrir une culture qui me fascine.
- Voir le monde dans son immensité, le simplifier, l’apprivoiser, et aussi ralentir le temps.
- Vivre intensément pendant un moment plutôt que de s’embourber dans la routine.
- Pour quelqu’un qui s’inquiète constamment à propos de tout et de rien, le cyclo-tourisme est une forme de thérapie efficace. Pour apprendre à relativiser, apprendre que « what doesn’t break you only makes you stronger ». Une phrase que je me répète souvent lorsque je voyage en vélo.
- Pour l’aventure, parce que c’est complètement marteau, parce que je pense que je peux le faire mais que je suis si loin d’en être certain.
- Parce trop de choses me paraissent tellement superficiels. Et aussi, il y a trop de ceux pour qui n’importe que de se sentir « big ».
- Parce que parfois, il faut savoir tourner la page et passer à autre chose.
- Porque viajar es la mejor escuela de la vida.